Je préfère encore être fou...
Créé le 18/08/2011 à 17h45 -- Mis à jour le 22/08/2011
FAMINE - L'insécurité et les détournements de l'aide humanitaire en Somalie rendent encore plus vulnérables les 3 millions de victimes de la pire sécheresse depuis 60 ans…
La crise s’aggrave dans la Corne de l’Afrique. Lors d’une réunion jeudi à Rome sur la sécheresse et la famine qui sévissent dans la région, le directeur de l'organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a averti que «plus de 12 millions de personnes risquent aujourd’hui de mourir de faim.»
Mais la situation est encore pire en Somalie, où les violences et détournements de l’aide internationale rendent encore plus vulnérables les 3 millions de victimes. L'aide humanitaire est bloquée par les rebelles islamistes Shebab, qui combattent le gouvernement de transition.
Selon Human Rights Watch, les travailleurs humanitaires peinent à faire leur devoir. «C'est un combat de tous les jours pour faire parvenir cette aide à des populations qui se trouvent dans un besoin extrême. La situation des travailleurs humanitaires reste très peu sûre», explique Neela Goshal, chercheur en poste à Nairobi à la division Afrique d'HRW.
L’aide, une cible convoitée par les milices armées
Mahieddine Khelladi, directeur exécutif de l’ONG Secours islamique, préfère parler de «risque important» de détournement. «Dans un hôpital que j’ai visité auquel on avait envoyé des médicaments, la pharmacie était vide», raconte-t-il, en appelant à «améliorer la coordination de l’aide».
Il reconnaît toutefois une «forte pression» pour détourner l’aide: «Quand on a fait la distribution dans une zone contrôlée par les Shebab, les milices armées nous ont demandé une part de l’aide. On a refusé en expliquant que s’ils insistaient on partirait sans rien donner, et ils nous ont laissé faire. C’est sûr qu’avec la multiplication des groupes armés, l’aide humanitaire qui arrive devient une cible très convoitée», observe-t-il.
De son côté, le gouvernement fédéral de transition somalien a démenti les accusations selon lesquelles certains responsables de l’administration publique auraient détourné l’aide humanitaire. Dans un communiqué publié mardi, les autorités somaliennes ont affirmé qu’«une enquête est en cours pour connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire» et que «les responsables seront traduits en justice, s’ils sont reconnus comme tels».
Le PAM enquête sur les détournements
Le Programme alimentaire mondial (PAM) reconnaît lui aussi qu’une partie de l’aide est détournée. Il réfute en revanche les chiffres avancés. «Certains parlent de 20 à 50%. C’est énorme! Nous fournissons 5.000 tonnes de nourriture chaque mois à Mogadiscio. Il n’est pas concevable que la moitié soit détournée. Ce n’est pas avéré et c’est même impossible d’un point de vue logistique», assure Marie Wentzell, porte-parole du PAM en France.
«Nous ne nous voilons pas la face et nous prenons les allégations de détournement au sérieux, ajoute-t-elle. La Somalie est l’environnement le plus dangereux et difficile dans lequel nous opérons. S’assurer que l’aide parvient aux bénéficiaires est une préoccupation constante. On va accélérer nos enquêtes pour voir ce qu’il en est, mais cela ne va pas se faire du jour au lendemain.»
Dans le New York Times, Mark Bowden, le chef des opérations humanitaires des Nations unies en Somalie, précise que «le vol de l'aide alimentaire est un problème ancien et profondément enraciné» dans le pays, en proie à la guerre civile depuis plus de vingt ans et dont le gouvernement de transition ne contrôle que la capitale.
F.V.
Quel aveu d'impuissance que la dernière phrase de Mark Bowden !